La chirurgie du futur débarque à Candiolo

À l’IRCCS de Candiolo, en banlieue de Turin, la lutte contre le cancer de la prostate entre dans une nouvelle ère. Désormais, la prostatectomie — intervention chirurgicale visant à retirer la prostate maligne — s’appuie sur une trilogie high-tech : robotique, intelligence artificielle et réalité augmentée. Cette alliance innovante permet d’optimiser la précision des gestes chirurgicaux, de réduire les effets secondaires et d’améliorer la qualité de vie des patients.

Quand l’IA guide le bistouri

La base de cette révolution est la technologie de modélisation 3D. Avant l’intervention, le patient subit une IRM ciblée de la prostate, dont les images sont traitées par un algorithme d’intelligence artificielle. L’IA identifie automatiquement les contours de la glande et les zones tumorales, puis construit un modèle virtuel détaillé.

Grâce à la réalité augmentée, ce modèle 3D est projeté en surimpression sur le champ opératoire. Le chirurgien, assisté d’un robot de haute précision, visualise en temps réel l’emplacement exact de la tumeur, ce qui lui permet de planifier les coupes et de préserver les structures nerveuses et vasculaires essentielles à la continence et à la fonction sexuelle.

Un travail d’équipe entre humain et machine

Durant l’opération, le robot tient la camera endoscopique et les instruments, tandis que le chirurgien contrôle à distance les mouvements grâce à une console ergonomique. L’intelligence artificielle ajuste en continu l’alignement du modèle virtuel, compensant les légers déplacements de l’organisme. Cette précision réduit la marge d’erreur et limite le traumatisme des tissus sains.

  • Modélisation 3D : fusion des images d’IRM et reconnaissance automatique des structures anatomiques par l’IA.
  • Réalité augmentée : superposition du modèle virtuel sur le champ opératoire pour une vision augmentée.
  • Robotique : instruments stabilisés garantissant des coupes millimétrées et une réduction du tremblement.

Les bénéfices pour le patient

Le programme de recherche RIDERS, coordonné par le Professeur Francesco Porpiglia, a comparé les résultats de 133 patients : 84 opérés par la technique robot-assistée classique et 49 par la nouvelle méthode augmentée. Les chiffres, publiés dans la revue European Urology, sont parlants :

  • Marges tumorales positives : 39 % dans le groupe standard contre 22 % avec IA et réalité augmentée.
  • Reprise complète de la continence : 91 % des patients améliorés contre 71 % dans le groupe classique.
  • Préservation de la fonction érectile : retrouvée chez plus de 40 % des hommes traités avec la technique augmentée.

Ces données confirment une radicalité oncologique maintenue tout en minimisant les effets secondaires, un objectif central pour les urologues.

L’expérience de l’équipe médicale

« L’intelligence artificielle ne remplace pas le chirurgien ; elle élargit son champ de vision », explique le Professeur Porpiglia. Selon lui, cette approche « représente la fusion idéale entre le savoir-faire humain et la puissance des algorithmes ». De son côté, le Directeur Général de l’IRCCS, le Dr Salvatore Nieddu, insiste sur l’importance d’une technologie « sûre et éprouvée », rappelant que chaque dispositif robotique est soumis à des tests rigoureux avant son déploiement.

Reconstruction de l’anatomie et préservation fonctionnelle

En superposant le modèle 3D sur l’image endoscopique, le chirurgien visualise les faisceaux neuro-vasculaires entourant la prostate en temps réel. Cette « vue augmentée » permet :

  • De préserver les nerfs responsables de la continence urinaire.
  • De sauvegarder les structures assurant l’érection.
  • De limiter la profondeur de la résection pour réduire la douleur postopératoire.

Le résultat se traduit par des séjours hospitaliers plus courts, une rééducation accélérée et un retour plus rapide aux activités quotidiennes.

Perspectives et diffusion de la technique

Fort du succès de l’étude RIDERS, l’équipe de Candiolo envisage d’étendre cette technique à d’autres centres urologiques. Plusieurs formations ont déjà été lancées pour diffuser le protocole opératoire et partager les outils logiciels. De plus, des travaux sont en cours pour adapter la plateforme à d’autres cancers, comme le carcinome de la vessie ou le cancer rénal.

Au-delà de l’Italie, ce modèle d’intégration entre robotique et IA suscite l’intérêt de plusieurs hôpitaux européens. Des partenariats avec des centres de recherche en Allemagne et au Royaume-Uni sont en discussion afin de valider l’approche sur de plus larges cohortes de patients.

Quel avenir pour la chirurgie urologique ?

Cette avancée technologique marque une étape décisive dans la prise en charge du cancer de la prostate. En combinant précision robotique, guidage intelligent et réalité augmentée, les chirurgiens offrent aujourd’hui aux patients une intervention plus sûre et moins invasive. Le défi futur sera de rendre cette innovation accessible à un nombre croissant d’hôpitaux, tout en poursuivant l’optimisation des algorithmes et des interfaces de réalité augmentée.

Exit mobile version