Comprendre le « maternal gatekeeping » et ses origines
Le terme « maternal gatekeeping » décrit un ensemble d’attitudes maternelles qui limitent, contrôlent ou découragent la participation active du père dans les soins aux enfants. Derrière cette dynamique se cachent souvent des stéréotypes de genre, mais également des traits de personnalité tels que le perfectionnisme et le besoin de contrôle. Selon la psychologue Cristina Di Loreto, fondatrice de la méthode Me First, ces comportements peuvent naître de :
- Pressions culturelles et institutionnelles : législations sur les congés parentaux, accès privilégié des mères aux services de maternité, perception d’une responsabilité exclusive de la mère.
- Steréotypes de genre : croyance que certaines tâches (change de couche, repas, hygiène) « révèlent » le rôle maternel, renforcée par un « matricentrisme » institutionnel.
- Prédispositions individuelles : tendance au perfectionnisme, difficulté à déléguer, anxiété liée à la performance et à la réussite des soins.
Les conséquences sur la charge mentale
En pratiquant le maternal gatekeeping, une mère assume une part disproportionnée des activités liées à l’enfant, augmentant ainsi son « capital mental » — ce poids invisible constitué des tâches administratives, logistiques et émotionnelles du foyer. Parmi les impacts :
- Epuisement psychologique : sentiment de ne jamais « lâcher prise », besoin constant de vérifier et de corriger.
- Isolement : réduction du soutien du partenaire, qui se sent écarté, voire peu compétent.
- Frictions familiales : disputes autour de la répartition des tâches, sentiment de non reconnaissance pour le père et culpabilité pour la mère.
Ce que révèle la recherche scientifique
Une étude publiée en 2017 dans la revue Sex Roles souligne que plus les mères adoptent des comportements de gatekeeping, plus elles prennent en charge toutes les activités de soin, laissant moins de place au père. Les auteurs notent également que :
- Les mères travaillant à temps partiel (très fréquentes au Royaume-Uni) portent un fardeau double : emploi professionnel limité et charges domestiques majorées.
- Les attentes élevées envers le partenaire (exiger un certain niveau de compétence) renforcent le cycle de contrôle et de critique.
Ce déséquilibre se traduit par une perte de confiance mutuelle et par la consolidation de rôles parentaux rigides qui peinent à s’adapter aux besoins réels de la vie familiale.
Présupposés culturels et transmission des rôles
Le maternal gatekeeping s’inscrit dans un cadre socioculturel où la maternité est valorisée comme dévouement exclusif. Même dans les sociétés « avancées », des normes subsistent :
- Discours médiatiques : programmes de puériculture, magazines parentaux vantant les « super-mamans ».
- Environnement médical : accent sur la mère lors des consultations périnatales, absence de protocole fort pour impliquer le futur père.
- Héritage familial : modèles transmis de génération en génération, sans remise en question du rôle paternel.
Pour Sofia, ces codes méritent d’être déconstruits afin d’offrir aux deux parents un espace équitable et sécurisé pour exercer leur parentalité.
Construire un projet parental partagé dès la grossesse
Une stratégie clé pour prévenir le maternal gatekeeping est l’implication du futur père avant la naissance : études montrent qu’un engagement précoce réduit le risque de contrôle maternel excessif. Concrètement :
- Participer aux consultations médicales : renforcer la relation entre le père et le bébé, légitimer son rôle.
- Organiser ensemble l’espace de vie : choix du mobilier d’enfant, planification des routines.
- Discuter ouvertement des responsabilités : instaurer un accord clair sur les tâches quotidiennes.
Techniques pour sortir du cycle de contrôle
Sortir du maternal gatekeeping requiert un travail personnel et conjoint. Voici quelques pistes proposées par Cristina Di Loreto :
- Identifier les croyances limitantes : prendre conscience des messages internes (« je suis la seule à savoir ») et les questionner.
- Mettre en place la délégation progressive : confier une tâche à la fois au père, l’encourager et valoriser ses efforts avant de passer à une autre.
- Favoriser la communication bienveillante : exprimer besoins et émotions sans blâmer, avec l’esprit du « nous ».
- Pratiquer l’auto-compassion : accepter les imperfections, cultiver la bienveillance envers soi-même.
Avantages d’une parentalité véritablement partagée
Lorsque le gatekeeping s’efface, la co-responsabilité se révèle bénéfique pour tous :
- Réduction de la charge mentale : la mère peut souffler, réduire son stress et consacrer du temps à ses propres activités.
- Renforcement du lien père-enfant : plus de présence et d’affection directe, impact positif sur le développement de l’enfant.
- Équilibre de vie : amélioration de la qualité de vie de la famille, respect de la carrière et des aspirations personnelles des deux parents.
Sur Terra-Femme.fr, nous encourageons un dialogue constructif pour repenser ensemble la parentalité moderne, au service du bien-être de toute la tribu.