La pauvreté réduit l’espérance de vie des seniors : jusqu’à neuf années de perdues
Une nouvelle analyse met en lumière une réalité brutale : l’espérance de vie des personnes âgées varie fortement selon le niveau de revenu. Selon une étude du National Council on Aging (NCOA) et du LeadingAge Long‑Term Services and Supports Center de l’université du Massachusetts, les seniors les plus modestes vivent en moyenne jusqu’à neuf ans de moins que leurs pairs les plus aisés. Ce n’est pas seulement une statistique froide : c’est le signe qu’un système de santé et social inégal laisse des cohortes d’aînés plus vulnérables, moins protégés et finalement plus exposés à la mortalité prématurée.
Des chiffres qui parlent
Les chercheurs se sont appuyés sur les données de l’Health and Retirement Study aux États‑Unis, en examinant la période 2018‑2022. Le constat est sans appel : chez les plus de 60 ans, le taux de mortalité des personnes disposant d’un revenu annuel inférieur à 20 000 dollars atteint 21 %, contre 10,7 % pour celles dont le revenu dépasse 120 000 dollars. Autrement dit, être pauvre après 60 ans double pratiquement le risque de décès sur cette période.
Au‑delà de la génétique : la pauvreté entre dans le corps
Pourquoi une telle différence ? Les auteurs et spécialistes interrogés — dont des gériatres — soulignent que la pauvreté agit par plusieurs voies convergentes :
Conséquences sanitaires concrètes
Ces mécanismes favorisent l’apparition et la progression plus rapide de maladies majeures : pathologies cardiovasculaires, troubles métaboliques, affections neurodégénératives et certains cancers. La pauvreté n’abrège pas seulement la vie : elle rogne la « qualité » de ces années, réduisant les années vécues en bonne santé.
Des inégalités qui se creusent — et qui coûtent
Le constat a des implications collectives : l’augmentation des hospitalisations, la complexité des prises en charge et la demande accrue en soins de longue durée pèsent sur les systèmes de santé. En clair, la pauvreté des seniors n’est pas qu’une question d’éthique, c’est aussi un enjeu économique pour les services publics et les assurances.
Ce que disent les spécialistes
Des experts en gériatrie rappellent que le phénomène n’est pas seulement américain : les déterminants sociaux de la santé affectent les seniors dans de nombreux pays, y compris en Europe. Dario Leosco, professeur de gériatrie, explique que la pauvreté devient un facteur biologique de risque via l’inflammation chronique et la fragilité multi‑organique.
Mesures à envisager pour réduire ces écarts
Le rôle de la prévention et de la solidarité locale
Au‑delà des mesures nationales, les initiatives locales — centres de santé communautaires, programmes municipaux de maintien à domicile, réseaux d’entraide — peuvent faire une différence tangible. Par exemple, des campagnes ciblées contre la grippe ou pour la prévention des pneumonies peuvent réduire notablement la mortalité chez les personnes âgées vulnérables.
Vers une vision plus juste de la longévité
Cette étude redessine la notion d’espérance de vie comme un indicateur qui ne dépend pas uniquement des progrès médicaux, mais aussi des politiques sociales et économiques. Assurer une longévité équitable suppose de traiter les déterminants sociaux de la santé au même titre que les traitements médicaux. Autrement dit : améliorer la vie des seniors pauvres, c’est investir dans la santé publique et dans la cohésion sociale.


